Les armoiries de la ville ASSOCIATION POUR L'HISTOIRE ET LE PATRIMOINE SEYNOIS


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Les armoiries de la ville H P S Textes du Colloque 2000

Sex Furni TERRE CHRÉTIENNE

TERRE D'ACCUEIL

Transcription du commentaire du document vidéo, par Marie France Grimbichler

La Documentation a été rassemblée par Claire Biteau, Marie Magdeleine Georges, Marie France Grimbichler et Martine Pin. Le montage vidéo a été réalisé par Denise et René Reverdito.

Décrire en quinze minutes près de 2000 ans d'histoire chrétienne sur ce territoire et en Provence, seule la vidéo pouvait permettre une telle gageure. Un rapide survol en images évoque donc l'implantation, la présence et le rôle du christianisme en terre seynoise et provençale selon onze séquences.

1° séquence : la légende des Saintes:

La Légende raconte que vers l'an 48, Marie Jacobée, sœur de la Vierge Marie, Marie Salomé, mère des apôtres Jacques et Jean, Lazare, Marthe, Marie Madeleine, Maximin et leur servante Sarah, chassés de Palestine, abordèrent sur une plage de sable fin prés de l'embouchure du Rhône. Ils éveillèrent la Provence à la foi.
Cette pieuse tradition acheva de se cristalliser aux XII° et XIII° siècles et fut d'une grande importance dans les dévotions de la Provence médiévale.

2° séquence: les premiers chrétiens

Dès les I° et II° siècles des marchands venus d'Orient qui débarquaient à Marseille ou en Arles, se sont mis à parler d'un certain Jésus qu'ils appelaient "Christ". Le message d'amour et de paix, dont ils se faisaient les porte-parole, séduisit les populations, qui à leur tour se firent disciples du Christ et formèrent les premières communautés sur notre territoire. Mais elles étaient en butte aux persécutions organisées par les autorités romaines.

3° séquence: le christianisme, religion officielle.

En 313, par l'édit de Milan, l'Empereur Constantin, qui lui aussi a embrassé la foi chrétienne, met un terme aux persécutions et donne au christianisme une place privilégiée dans l'Empire.
L'année suivante, il préside en Arles, le premier concile d'Occident. Un siècle plus tard, la ville reçoit la dignité d'archevêché des Gaules.

4°séquence: l'essor du christianisme

Au début du V°siècle, pour se rapprocher de Dieu, les plus fidèles fondent des monastères pour prier dans la solitude. En 410, Saint Honorat s'installe sur l'île de Lérins et entreprend la construction de l'abbaye.
En 416, Jean Cassien, né à l'embouchure du Danube, atteint Marseille au terme d'un long séjour en Orient auprès des "Pères du Désert", et y établit l'abbaye Saint Victor. Elle devient un grand foyer de diffusion et de rayonnement de la foi chrétienne.
Symboles de la conversion et de l'entrée dans les communautés chrétiennes, les baptistères paléochrétiens d'Aix et de Fréjus, les sarcophages d'Arles reflètent les progrès du christianisme.

5°séquence: les chrétiens de Six-Fours

A la même époque, une communauté chrétienne existe déjà à Six-Fours. Elle dépend de l'évêché de Toulon fondé en 440.
En 515 deux soldats wisigoths, Mandrianus et Flavinus, convertis par Saint Cyprien, le suivent à Toulon. Recherchant la perfection dans leur pratique religieuse, ils deviennent ermites sur l'île de Cépet.

6°séquence: les premières chapelles

Les lieux de culte apparaissent peu à peu. Au VI°siècle, les abbés de Saint Victor, propriétaires des terres au sud de la Reppe, font construire la Chapelle de la Pépiole. Au XI° siècle est édifiée la collégiale Saint Pierre. Au même siècle, existe déjà au Creux Saint Georges, un prieuré fréquenté par les marins venus se mettre à l'abri de l'île de Cépet.

7°séquence: la foi en Provence

Tout au long du Moyen âge, la Provence se couvre de chapelles, d'églises et d'abbayes. Au XIII°siècle la Saint Baume devient un grand centre de pèlerinage. Le comte Charles II d'Anjou découvre des reliques de Sainte Marie Madeleine. Il fait édifier à Saint Maximin une magnifique basilique gothique. De toutes parts les pèlerins affluent. le culte de Sainte Marie Madeleine, patronne de la Provence, se renforce. Les rois de France eux-mêmes, dont Louis XIV, viennent prier la Sainte.

8° séquence: naissance de La Seyne

Au XVI°siècle, Six-Fours s'agrandit. Des habitants sont installés au quartier de "La Sagno". En 1603 l'Abbé de Saint Victor, Robert de Franchipani, seigneur des lieux, autorise la construction d'une église placée sous le vocable de "Notre Dame de Bon Voyage". le 12 juillet 1614, un acte pontifical érige le hameau en paroisse. Le 22 avril 1658, jour de Pâques, dans la Chapelle des Pénitents Blancs située sur l'actuelle Place Séverine, la communauté de La Seyne est officiellement instaurée par lettres patentes du Roi de France. Très vite son développement exige la construction d'une église plus vaste inaugurée en 1682. En 1700, le Conseil de la communauté choisit un blason inspiré des Evangiles: il rappelle que les Seynois étaient une communauté d'agriculteurs et de pêcheurs.

9°séquence: piété et dévotion populaires

Témoignent de la ferveur populaire les oratoires, érigés sur les chemins qui conduisent à Notre Dame de Bonne Garde (Notre Dame du mai) construite en 1625, les ex-voto qui en tapissent les murs, les niches abritant une Vierge, et creusées dans les façades du centre ville.
L'année est aussi ponctuée de nombreuses manifestations religieuses, dont des processions et la plus importante, la tradition calendale.

10°séquence: l'Eglise dans la société

L'Eglise a alors en charge l'assistance publique et l'éducation. les plus pauvres et les mourants reçoivent le soutien des confréries de Pénitents. Les malades sont soignés à l'Hôtel-Dieu par des religieuses. En 1865, enquêtant sur l'épidémie de choléra, le docteur Prat signale "le dévouement des Dames ?" (archives départementales)
L'orphelinat était tenu par des sœurs de Saint Vincent de Paul. En 1849 est ouvert le collège des Pères Maristes à l'emplacement de l'ancien couvent des Capucins.
En 1858 les religieuses de Notre Dame de la Visitation s'installent dans le quartier des Mouïssèques et ouvrent dans leur couvent une école de filles. L'Institution Sainte Marie, toujours active, témoigne de ce passé.

11° séquence: l'Eglise plurielle

L'essor de la construction navale au XIX° siècle attira de nombreux travailleurs immigrés, souvent chrétiens. Les Italiens hier, les fidèles originaires d'Afrique Noire aujourd'hui donnent un nouvel élan à la foi. Depuis 1962, les Français rapatriés d'Algérie peuvent se recueillir devant la statue de Notre Dame de Stora en la chapelle qui lui est désormais dédiée.
Durant la même décennie le développement urbain nécessita la création de nouvelles paroisses: Notre Dame de la Mer à Mar Vivo et Saint Jean Baptiste à Berthe.
Certains prêtres partagent alors avec les travailleurs des Chantiers navals ou d'autres entreprises, leurs conditions de vie. Ils témoignent par leur présence, de l'esprit de l'Evangile et s'engagent dans les luttes syndicales, se rapprochant et s'intégrant dans le mouvement ouvrier seynois.
Des immigrés venus d'horizons religieux différents se sont aussi installés à la Seyne. Sur cette terre d'accueil, l'Eglise s'ouvre au dialogue inter-religions.

Bibliographie sommaire:

  • Louis Baudoin: Histoire générale de la Seyne sur Mer
  • Louis Baudoin: L'église paroissiale Notre dame de Bon Voyage.
  • François Jouglas: Six-Fours, guide historique et touristique.
  • Marius Autran: Images de la vie seynoise d'antan, tome VII
  • M. Aguhlon et N. Coulet: Histoire de la Provence, PUF, 1987
  • Collection "les grandes heures des Eglises", les chrétiens en Provence, Clé de route.
LES REPERES RELIGIEUX

Evoquer Sex-Furni, Six-Fours (Six Forts), ce n'est pas seulement entrer dans l'histoire de la petite commune de Six-Fours, c'est étendre son regard sur un territoire qui va d'ouest en est, de La Reppe (aux limites de Sanary) à Lagoubran, puis jusqu'au cap Cépet et du nord au sud des limites du territoire d'Ollioules et de Toulon jusqu'à la mer Méditerranée.

Evoquer cette terre ancestrale, dont l'occupation humaine remonte à la nuit des temps, (environ 40 000 ans avant notre ère) occupée par les Grecs puis les Romains, terre des Vicomtes de Provence, appartenant en partie à l'Abbaye de Montmajour, puis donnée au XI° siècle à l'Abbaye de St Victor de Marseille, qui, au XVI° siècle, "engendra" le bourg de La Seyne, lequel à son tour, donna naissance en 1950 à la commune de Saint Mandrier, évoquer cette terre, ce n'est pas uniquement déverser une suite chronologique d'événements ayant ponctué son passé, c'est aussi rendre hommage à sa vocation de terre d'accueil et découvrir à travers son histoire et son présent qu'elle est profondément marquée par son attachement à la foi chrétienne.

Témoins incontestables de cet attachement à la foi chrétienne, les trois Blasons, qui à la fois personnalisent les communes de Six-Fours , de La Seyne sur Mer et de Saint Mandrier et les rassemblent en une même famille chrétienne .

Le blason de Six-Fours "de gueules (rouge) à une coquille d'argent ombrée de sable". D'où vient la présence de la coquille de pèlerin dans les armes de cette ville? Peut-être est-ce en mémoire de Hughes Geofroy , Comte de Provence et seigneur de Six-Fours, qui légua ses biens aux abbés de Saint Victor en l'an 1073, avant de partir pour la Terre Sainte.

Par ailleurs un grand chapiteau en marbre blanc d'inspiration corinthienne avec une coquille sur le devant a été découvert il y a longtemps au sommet de Six-Fours. Il est actuellement déposé sur l'autel de Saint Pierre, dans la vieille collégiale. "Est-ce cette coquille qui aurait donné l'idée des armes de Six-Fours?", suppose François Jouglas, dans son "Guide Historique de Six-Fours "(1966)

Les archives municipales de La Seyne, sous la plume de R. Lanoë, apportent d'autres hypothèses: "on observe trois coquilles d'argent, 2 en flancs, 1 en pointe dans les armes de la famille Denans; on les retrouve gravées sur la pierre, au dessus de l'autel de la chapelle Ste Catherine dans la partie romane de la collégiale. Famille certainement bienfaitrice de la communauté et de l'église locale: Antoine, prieur de ND de la Courtine en 1610, Denis, même titre en 1625, Pierre, prieur de St Jean des Crottes, même date, Pierre, chanoine en 1656, Guillaume , chanoine en 1650, Pierre, Jacques et Louis, chanoines en 1690, Jean, notaire royal à La Seyne en 1697, Louis, doyen du chapitre en 1716, Pierre, chanoine en 1725, Melchior, chanoine en 1779 ( Annales de Six-Fours , 1866)

D'autre part , on sait qu'un écusson comportant une coquille figurait sur la cloche de l'ancienne horloge du Vieux Six-Fours qui fut transportée au clocher paroissial en 1875.

En attente de recherches complémentaires on peut aussi supposer, toujours d'après R. Lanoë, que la présence de la coquille a été inspirée à l'occasion d'un retour du Mont Saint-Michel , de St Jacques de Compostelle, de Rome ou de Jérusalem, d'un pèlerin ou de plusieurs Six-Fournais, religieux ou laïcs, quémandeurs d'indulgences et de grâces pour eux-mêmes et la communauté. On sait que les pèlerins, outre leur bourdon, avaient coutume d'arborer sur leur vêtement ou leur coiffure une coquille Saint Jacques ou du Mont St Michel, coquille qui devint une figure héraldique à la fin du XIII°siècle.

De plus, au niveau de la symbolique, on trouve la coquille à toutes les époques et dans tous les styles de décoration, en architecture, sculpture, gravure, enluminure, en fronton sur les porches, fontaines, bénitiers, autels…

Lors d'un baptême chrétien, dans certaines paroisses, l'officiant verse l'eau "qui fait naître à la vie surnaturelle", sur la tête du néophyte avec une coquille St Jacques, réminiscence probable de l'iconographie qui représente souvent, depuis le 15° siècle, le baptême de Jésus par Saint Jean-le-Baptiste, vidant l'eau d'une coquille sur la tête du Messie, geste continué par le pape Jean Paul Il qui utilise une coquille d'or lorsqu'il baptise à Rome.

Le blason de La Seyne sur Mer: "d'azur à deux poissons d'argent l'un sur l'autre, le second contourné et un chef cousu de gueules chargé de cinq pains d'or posés deux et trois."

La symbolique de ce blasonnement est incontestablement chrétienne: elle représente le miracle, réalisé par Jésus, de la multiplication des cinq pains d'orge et des deux poissons, qui est relaté dans les textes des quatre évangélistes, Mathieu, Jean, Luc et Marc, prélude aux futurs banquets eucharistiques et preuve de l'amour de Dieu qui a pitié des hommes, de la foule affamée de nourritures terrestres et spirituelles". On sait aussi qu'avant d'honorer la croix, les premiers chrétiens symbolisèrent le Christ par un poisson.

Cette symbolique a été laïcisée en rappelant que l'agriculture et la pêche étaient les ressources principales du hameau seynois antérieurement, puis au moment de son détachement du bourg de Six-Fours.

On peut y ajouter la symbolique des couleurs des émaux principaux, assortie d'obligations morales, vertueuses et chevaleresques qui font honneur aux détenteurs: l'azur, ou bleu, suppose les vertus de justice, loyauté, courage, et les qualités de douceur et de persévérance. Elle oblige à la défense des faibles, et donne le calme et la force réfléchie. Le gueules, ou rouge, suppose les vertus de charité, de magnanimité, les qualités de vaillance, de hardiesse, et oblige de redresser les torts. (Selon R. Lanoë)

Le premier blason, présenté en 1697, 40 ans après la séparation de la Seyne d'avec Six-Fours, , homologué en 1700, était orné extérieurement et des deux côtés par des rameaux de "siagne", plante marécageuse qui envahissait les terres orientales de Six-Fours. Pour pouvoir y édifier de nouveaux quartiers sur le quartier dit de la "Sagno", on dut les couper avant d'assécher les marécages où croissait cette plante. La siagne est supposée avoir été à l'origine du nom de notre ville. A moins que le nom "La Seyne" ne vienne, comme le note Mistral dans le "Grand trésor" du Provençal, de "seino, sègno", grand filet de pêche qui pourrait dériver du mot "cenha" = ceinture, bande, enceinte de filet.

L'écu fut surmonté plus tard de la couronne comtale des abbés de Saint-Victor de Marseille, qui étaient seigneurs temporels et spirituels des habitants de ce terroir. Cette distinction nobiliaire avait été accordée par "lettres patentes de Versailles, en mars 1774, à tous les chanoines de l'Abbaye Saint-Victor de Marseille co seigneurs de Six-Fours, La Seyne et autres lieux, prouvant 150 ans de noblesse paternelle". (selon E. Perrier) Sous l'écu, pendait la croix épiscopale de ces mêmes abbés.

Une banderole dédiée à Marie, traversait l'écu. On pouvait y lire en latin: "AVE MARIS STELLA, DEI MATER ALMA", ce qui signifiait: Salut, Étoile de la mer, très auguste Mère de Dieu". Ainsi la ville de La Seyne se mettait-elle sous la protection de la Vierge Marie qui en devenait la Sainte Patronne. D'ailleurs, les fêtes de La Seyne commençaient, jusqu'à la fin des années quarante, par une procession, allant du port jusqu'à l'église de la statue de Marie, Notre Dame du Bon Voyage.

Après la Révolution de 1789, les ornements religieux et royaux furent supprimés: la couronne comtale fut remplacée par une couronne de tours dont le nombre symbolise l'importance de la ville dans le département. Ainsi depuis 1973, les villes de Six-Fours, La Seyne et Saint Mandrier, sont-elles dotées de trois tours indiquant qu'elles sont chefs-lieux de canton. La siagne fut remplacée par des branches de chênes et de lauriers, en liaison avec la végétation locale? ou par référence aux Romains, pour marquer la symbolique de gloire et de force?

Le blason de Saint-Mandrier est apparu officiellement en 1950, date de la séparation de La Seyne et de Saint-Mandrier. "Il figurait pourtant sur les cachets apposés depuis 1937 sur le registre particulier d'état-civil du hameau, qui n'était alors que section de La Seyne", nous apprend R. Lanoë. Dans cette séparation, il ne faut voir aucune animosité entre les deux villes. Pour preuve, on retrouve dans le blasonnement de Saint-Mandrier les mêmes émaux et les deux poissons, à la fois symbole chrétien et signe d'attachement à la ville mère. "Écu taillé d'une lance d'argent ferrée d'or servant de trait de partition: au 1 de gueules à deux poissons d'argent à deux poissons d'argent l'un sur l'autre, le second contourné; au 2 d'azur à une ancre d'argent, et à un casque de guerrier antique d'or brochant sur le tout en abîme."

On retrouve au premier degré l'expression de la vocation maritime de la presqu'île: "poissons pour les pêcheurs et ancre pour le port", symbole également de la présence de la Marine Nationale avec ses nombreuses installations et activités". Mais la symbolique de ce blason est encore une fois et avant tout, empreinte essentiellement de l'attachement des populations à la foi chrétienne: les poissons, signe de reconnaissance des anciens chrétiens. L'ancre est symbole de la vertu théologale d'espérance. Saint Paul qui souvent affronta les périls de la mer, n'écrit-il pas : "...nous qui nous sommes réfugiés, pour y tenir ferme, en l'Espérance qui nous est proposée, en elle nous avons pour l'âme comme une ancre sûre et solide" (Ep aux Hébreux). Sur les sceaux, les premiers chrétiens faisaient graver différents symboles, une colombe, un poisson, une ancre, une lyre. "La colombe pour l'innocence ou le Saint-Esprit l'ancre, signe de solidité de la foi chrétienne, la lyre, symbole de louange et d'adoration, le poisson rappelant les eaux sacrées du baptême où les fidèles sont régénérés".

Toujours d'après les recherches de R. Lanoë: le casque et la lance, attribut guerriers de Mandrier avant sa conversion et son arrivée dans la région sont les symboles de noblesse., de force prudente et de constance inébranlable. Au siège d'Arles un prêtre, que nous connaissons sous le nom de Saint Cyprien, prit la défense de son évêque Saint Césaire, accusé de trahison par les chefs de l'armée wisigothe, et il parla avec tant d'éloquence de la divinité de Jésus-Christ et de la vérité de la religion catholique qu'un grand nombre d'ariens et d'idolâtres se convertirent.

"Au nombre de ces derniers se trouvaient Mandrianus et Flavianus, deux soldats wisigoths qui furent catéchisés, baptisés et absous par Saint Cyprien lui-même. Ils s'attachèrent à Saint Cyprien et le suivirent à Tholo (Toulon), siège épiscopal". La conversion de ces valeureux soldats les avait rendus suspects aux hérétiques qui les poursuivirent jusqu'à Toulon où ils s'étaient réfugiés. "La vie de ces deux soldats n'étant pas en sûreté dans cette ville, ils vinrent demander l'hospitalité au prêtre de Sex-Furnus. Ce pays quoique très rapproché de Tholo, offrait pourtant un asile sûr à ceux qui y fuyaient la persécution. La mer entourait presqu'entièrement cette contrée. Mandrianus et Flavianus ayant fait des progrès rapides dans la voie de la perfection, ils furent bientôt appelés à un genre de vie plus sublime: ils se retirèrent du monde et se construisirent une cellule dans les bois de Mesles, qui couronnaient la montagne de Saint Trophime, (caput sancti Trophimi apud Sex-Furnus, cap Cépet) où ils vécurent en anachorètes et moururent saintement comme ils avaient vécu. Ceci nous est relaté par Madame G. Argensse dans son livre "Saint Mandrier terre d'accueil". Elle propose également une variante sur la fin de ces deux personnages: dans le manuscrit d'Honoré Aycard (archives de Toulon 1636), il est dit: ils menèrent "une vie érémitique jusqu'en l'an 566, moment où ils furent martyrisés en compagnie de Saint Cyprien". Quoiqu'il en soit, Saint Mandrier, durant sa vie d'ermite sur l'île de Cépet, fit ce que d'autres ermites résidant sur les côtes, faisaient en ce temps là: il veillait, surveillait la côte, prêt en cas d'attaque ennemie à donner l'alerte par des feux codés et aussi à préserver les bateaux entrant dans la rade de Toulon. Après la mort de ces deux ermites, les corps furent déposés dans "une tour phocéenne dont ils avaient la garde puis leurs reliques furent portées à l'évêché de Toulon et enfin à la cathédrale de cette ville" (d'après Béranger- Feraud)

Sous l'écu, une banderole avec cette devise: "Semper Mandrianus vigil", ce qui signifie "toujours Mandrier veille". Comme La Seyne autrefois s'était mise sous la protection de Sainte Marie , Saint Mandrier se place sous la protection spirituelle de Saint Mandrier.

Le christianisme dans les fêtes locales

Le christianisme a si fortement marqué notre terroir qu'on en retrouve la trace dans nos fêtes locales: bravade de Saint-Tropez; procession et messe à Sanary pour la Saint Nazaire; le Pardon de Correns; les feux et procession de Saint Jean; les Tripettes de Barjols pour la Saint Marcel; feu, procession, messe avec offrande du citron au curé (ancienne dîme) et bénédiction des chevaux pour Saint Eloi à Signes, le Beausset, Cuges. Les Fêtes-Dieu étaient autrefois l'occasion de procession en ville et dans les beaux jardins jonchés de pétales de roses.

Les lancements de bateaux à La Seyne, étaient empreints d'une solennité administrative et ecclésiastique. Le curé, en habits sacerdotaux d'apparat, arrivait dans l'enceinte des chantiers navals portant le goupillon et l'eau bénite, suivi de nombreux enfants de chœur vêtus de surplis blanc sur une aube rouge. Aucun homme n'aurait pris la mer si le bateau n'avait été auparavant baptisé par l'Eglise.

Pour la chandeleur : procession des cierges verts à Marseille autour de l'Abbaye de Saint Victor et distribution des "navettes", petits biscuits à l'anis ayant la forme des barques des Saintes Maries.

Le Félibrige, cette académie de Provence fondée par notre grand poète Mistral avec six de ses compagnons, tous écrivains ou poètes, pour maintenir la langue et les traditions de Provence, a choisi pour se parrainer Sainte Estelle, car l'emblème des Félibres est l'étoile à sept branches: Estelle pour étoile et sept branches car ils étaient sept académiciens fondateurs, mais notons aussi au passage que sept est un chiffre biblique porte-bonheur.

Quant à l'hymne de notre Provence, il s'intitule "Coupo Santo", ce qui signifie "Coupe Sainte". Rajoutons que les chrétiens de Provence à la fin de toute messe festive chantent leur hymne "Prouvençau e Catouli", "Provençaux et Catholiques". Et si la bible n'existe pas encore en langue provençale, (mais cela ne saurait tarder, Père Pascalin s'en occupe) Frédéric Mistral a depuis longtemps composé un "Notre Père" que l'on chante en langue méridionale.

Noms de lieux chrétiens et pèlerinages

Et si l'on répertorie les noms de lieux, on ne peut que constater la diversité des Saints qui ont marqué notre région: la grotte de Saint Césaire, le lac de Saint Cassien, celui de Sainte-Croix, les villes de Sanary (Saint Nazaire), Saint-Tropez, Saint Zacharie, Sainte Maxime, Saint Maximin, la Sainte Baume, Saint Jean du Var, Saint-Cyr, le moulin de Saint Côme... Mais aussi des noms de quartiers: Saint Honorat, Saint Antoine, Sainte Anne, dans lesquels on trouvait autrefois un oratoire dédié au saint patronyme, dont la fête donnait lieu à une fête du quartier. La liste serait longue si l'on voulait s'aventurer sur ce chemin en parcourant toute la Provence.

Pour ce qui est des lieux de pèlerinages, il en est de même nous nous bornerons à une évocation succincte: celui de Cotignac vers "Notre-Dame de Grâce" où Louis XIII se rendit pour demander la grâce de voir lui naître un fils qui lui succéderait. (il fut exaucé). Celui de "Saint Pierre-ès-Liens" à Six-Fours rassemble début Août les Provençaux pour une grand-messe puis une fête folklorique. Ceux de Notre-Dame de Bonne Garde", dite "Notre-Dame du Mai", tout au long du "Mois de Marie", le mois de mai, et pour le 14 septembre (fête de l'Exaltation de la Sainte Croix) donnaient lieu, il y a peu de temps encore, à de grands rassemblements de la population seynoise, six-fournaise et toulonnaise, à des processions et à une fête populaire dans la forêt de Janas. D'autres processions marquantes ont honoré ce lieu de culte, la toute première fut sans doute celle de 1625 organisée par les pénitents gris de Six-Fours pour planter au sommet de ce cap une croix en remerciement du miracle qui avait préservé les gardiens de la foudre tombée sur leur hutte, puis d'autres processions organisées après de grandes épidémies (1721, 1865), ou après la guerre. Et tout au long de l'année mais plus particulièrement, le 22 Juillet pour la Sainte Marie-Magdeleine, les pèlerinages à la Sainte Baume méritent qu'on s'y attarde quelque peu.

Tout d'abord "Baume" vient du provençal "Baumo" qui signifie "grotte". Le massif qui barre le département du Var d'Ouest en Est, et la forêt qui le tapisse porte le nom donné à cette grotte sanctifiée puis aménagée en chapelle car Sainte Marie-Magdeleine y vécut en prière et en ermite les 30 dernières années de sa vie. Elle recevait de loin en loin la visite de Saint Zacharie ou de Saint Maximin. Sept fois par jour, les anges venaient la hisser jusqu'au Saint Pilon, sommet de ce massif à l'aplomb de la sainte grotte et là, elle restait en prière s'émerveillant sans doute des beautés de notre pays et du chant mélodieux des séraphins, merveilles crées par Dieu.

Raoul Bérenguier dans son livre "Eglises et Abbayes du Var" explique que le corps de la Sainte fut inhumé par les soins de "Maximin, évêque d'Aix, dans la plaine, auprès d'un oratoire. Au début du V°s, une colonie de Cassianites s'établit au-dessus de son tombeau et en devint le gardien. En 716, lors de l'invasion de la Provence par les Sarrasins, cette crypte fût comblée pour soustraire les précieuses reliques à la fureur des Infidèles. En 1254, Saint Louis en compagnie de Joinville, vint en pèlerinage sur ces lieux saints, à la grotte et au reliquaire de saint Marie-Magdeleine, prouvant ainsi que le souvenir de ces reliques enterrées ne s'était pas effacé. Charles d'Anjou, frère de Saint Louis, après son mariage avec Béatrice, fille du comte de Provence Raymond Béranger V, fit procéder à des fouilles. Il fut assez heureux pour retrouver la crypte et ordonna qu'une magnifique basilique fût construite au-dessus du tombeau; il en confia la garde aux fils de Saint Dominique. "

Les papes d'Avignon, les rois de Provence, les rois de France, Louis XI, François I°, Louis XIII, Louis XIV, et Anne de Bretagne se sont rendus en pèlerinages sur les lieux du reliquaire et à la grotte. D'ailleurs un des chemins qui mène à la grotte est baptisé "Chemin des Rois".

Oratoires et Ex-voto

1- Tous ces chemins de pèlerinages sont jalonnés d'oratoires. Oratoire vient de "orare" qui signifie "prier" en latin. En effet ces petits monuments, creusés dune niche abritant la statue d'un saint, sont autant de stations de prière pour les pèlerins, leur permettant également de reprendre haleine à intervalle régulier car tous les lieux saints attirant les pèlerinages se hissent au sommet de promontoire.

Dans "Les oratoires du Var, essai d'inventaire", L. Henseling et P. Irigoin les décrivent. "Ces oratoires sont de formes diverses: pilons cylindriques, pilons rectangulaires, coiffés diversement de toits à deux égouts de tuiles rondes, de pyramides, de dômes ou de bulbes. Il y en a d'élancés et de trapus; les niches vont du cintre à l'ogive, sont carrées ou rectangulaires, les croix qui les surmontent sont souvent de délicieuses ferronneries."

Ils sont faits de briques ou de grosses pierres sommairement taillées. Certains tirent leur pittoresque de leur architecture, d'autres de leur emplacement (posé sur un rocher, au creux d"un chêne frappé par la foudre...)

"Si les oratoires sont répandus à travers toute la France, et même hors des frontières, on ne peut contester que c'est la Provence qui en renferme le plus grand nombre: près de 1700 y ont été repérés … Pour le département du Var…plus de 500 oratoires "ont été classés ( Essai d'inventaire)

Quelle est l'origine de ces petits monuments religieux ? Une fois encore c'est dans le livre "Les oratoires du Var" et dans le "Manuel d'Archéologie Française" que nous trouvons une réponse. Ces oratoires seraient à rapprocher des "montjoies qui dérivent des piles romaines, pyramides d'architecture ornées de niches qui abritent des sculptures religieuses, un autel les accompagne souvent et une croix les couronne.

"Maintes autres définitions ont été données sur ces petits monuments, depuis le Cardinal Hugues de Saint-Cher au XIII°s, rapportant la coutume des pèlerins qui faisaient des montjoies (monts de joie) de monceaux de pierres sur lesquels ils plantaient des croix aussitôt qu'ils voyaient le lieu de dévotion où ils allaient en pèlerinages.

"Faut-il considérer comme le plus ancien de tous ceux connus à ce jour, celui qui, près du Brusc, évoque le souvenir de la défaite des Sarrasins par les Six-Fournais, le 1°août 950, connu sous le nom d'oratoire de Malogineste? Mais c'est à partir du XVI°s que nous commençons à en rencontrer … Peu d'oratoires au XVII°s … probablement ont-ils été démolis ou sont-ils tombés en ruine; c'est surtout à partir de 1720, après la peste qui fit tant de victimes en Provence, que l'on rencontre par centaines ces petits monuments érigés par la piété de nos anciens."

2 - Les "Ex-voto" sont de petits tableaux représentant chacun un événement dramatique différent au cours duquel un être humain a été miraculé grâce à l'intervention de la Vierge à qui la personne en danger s'est recommandée. Ces petites œuvres d'art peintes tantôt par le miraculé lui-même ou l'un de ses proches, tantôt par un spécialiste, étaient accrochées dans les chapelles par nos anciens en remerciement, en reconnaissance à Marie pour le miracle accompli.

François Jouglas dans son "Guide historique et touristique de Six-Fours, les décrit ainsi : "Les ex-voto de nos anciennes chapelles donnent à qui veut les regarder une idée des actes de foi de nos aïeux et par là même une idée de leur genre de vie relative aux dangers qu'ils pouvaient courir à leur époque." Ils sont également un témoignage des différents aspects sociaux de l'époque qu'ils représentent: habits, ameublement, draperies, voirie, moyens de locomotion, armement, événement marquant.

On en trouve dans tous les lieux de pèlerinage: à Notre-Dame des Anges dans les Maures, dans une chapelle qui domine le port de Sanary, à la chapelle du Beausset-Vieux, à Notre-Dame du Mai, à Notre-Dame de la Garde à Marseille… Pour la région de Six-Fours et le Beausset, F. Jouglas en a recensé 104, "témoignant de la foi depuis 1722 à 1923, mais dont le plus grand nombre est de la deuxième moitié du XIX°s.

On peut les "grouper en cinq grandes catégories d'événements qui inspirèrent aux Provençaux de recourir à la Vierge pour se protéger:

- Heureuse issue d'une maladie 56

- Accidents de transport 3 7

- Accidents de travail 10

- Accidents individuels 25

- Divers ( foudre, guerre) 12

Les tableaux de grandes dimensions représentent des pèlerinages en hommage à la Vierge à la suite d'épidémies de peste." (voir illustration)

Beaucoup de ces témoignages de piété ont disparu, volés, détruits pendant la révolution, détériorés par l'humidité… Mais les tableaux rescapés et plus particulièrement ceux peints par des spécialistes, genre "d'écrivains publics", nous fournissent force détails: "ils reproduisaient la scène qui leur était décrite, donnant sur la toile ou le bois, l'image la plus exacte possible du lieu où l'intercession de la Vierge s'était produite et les circonstances de l'accident. Ces spécialistes devaient exister dans les villes comme Toulon " et devaient travailler pour toute une région, car on remarque une similitude dans la facture et les coloris des ex-voto déposés dans des chapelles assez éloignées.

Traditions Calendales

C'est pour Noël, que la Provence sublime son attachement au christianisme. Les fêtes de Noël ou fêtes calendales (de "calen", petite lampe à huile ou des "calendes romaines") débutent avec la période de l'Avent (du verbe advenir: la naissance du messie advient) dès le 4 Décembre par la Sainte Barbe. On faisait germer dans trois siétons (soucoupes) du blé et des lentilles que l'on arrosait régulièrement et qui donneraient trois splendides gerbes vertes qui seraient attachées chacune par un ruban de couleur vive et que l'on posait sur la table du "gros souper" le 24 au soir. Si les pousses étaient bien vertes et bien drues, cela augurait de la bonne qualité prochaine de la récolte. Le matin du 25 décembre on les plaçait dans la crèche en offrande à Jésus: ainsi nos anciens s'assuraient pour leur travaux des champs de la protection divine de Ste Barbe et de Jésus.

Pour la veillée du 24 Décembre, c'était toute une préparation rituelle qui trouvait ses bases dans la religion: la table du gros souper devait être recouverte de trois nappes blanches superposées, on posait dessus trois chandeliers, les trois siétons de blé et lentilles, douze petits pains et un gros pain, puis on décorait avec du houx posé sur la nappe. Le "gros souper" était un repas maigre c'est à dire sans viande, mais il était abondant: gratins de légumes, raïto (morue frite accompagnée d'une sauce au vin et aux câpres), céleri trempé dans l'anchoïade, fromages. On débarrassait la table des reliefs du repas salé et l'on disposait les treize desserts: ce sont les noix, noisettes, amandes et figues sèches, appelés les "mendiants" parce qu'il ont la couleur des bures des moines mendiants, puis le nougat noir et le nougat blanc, la pompe à huile que l'on trempe dans le vin cuit de Provence, les dattes dont le "0" gravé sur le noyau serait la marque de l'émerveillement de Marie devant ce fruit, les raisins secs et les fruits frais, pommes, oranges, poires, mandarines.

Où se situe le lien avec le christianisme dans ce rituel? Eh bien, dans les nombres trois pour représenter la trinité, treize pour figurer Jésus et les douze apôtres.

A notre époque on rajoute l'indispensable bûche glacée. Or autrefois, la bûche entrait dans la maison le soir de Noël mais pas sous forme de gâteau: on coupait dans le jardin une belle branche de poirier, le plus vieux et le plus jeune de la famille la transportaient en faisant trois fois le tour de la maison, (encore le chiffre biblique!) puis on entrait la mettre dans le foyer où un feu avait été allumé au préalable; auparavant l'ancêtre avait dû arroser le tronçon de bois d'un verre de vin cuit en prononçant en Provençal des paroles attendues de tous: "Allégresse, allégresse! A l'année prochaine!

Et que si nous ne sommes pas plus,

que nous ne soyons pas moins."

Cette bûche devait se consumer durant toute la veillée, si elle venait à s'éteindre trop tôt, c'était un mauvais présage. Quand la veillée était terminée, on retirait le brandon restant, on l'enrubannait et on le conservait dans la maison bien précieusement car il était supposé épargner la maisonnée contre l'orage et devait servir à allumer le feu de la veillée de Noël l'année suivante. Ainsi la boucle serait bouclée, symbolisant la continuité de la vie.

Bien sûr il y a plus de superstitions que de croyances religieuses dans ces pratiques, mais en Provence on a l'art de l'amalgame dans ce domaine et l'on retrouve dans bien des rites festifs provençaux (danses, feux de St Eloi) cet attachement au feu qui symbolise la puissance divine et ce rite du lien perpétuel qui symbolise la vie qui ne s'arrête jamais et pourquoi ne symboliserait-il pas la vie éternelle?

Mais la veillée de Noël ne s'achevait pas sans un autre rite : il était de tradition de ne pas débarrasser table afin de laisser, toute la nuit ces desserts en offrande aux bonnes âmes de la famille. En revanche pour que les mauvaises âmes ne puissent pas se hisser de l'enfer jusque sur la table calendale attirées par les gourmandises, on prenait soin de relever les quatre coins des nappes sur le plateau de la table. Puis on partait assister à la messe de Minuit.

Le lendemain de Noël était une journée fériée. On mangeait quelquefois l'aïoli puis on partait rendre visite à des voisins, des parents, des amis avec qui au cours de l'année on avait eu quelques frictions. Et là on renouait amitié. Car Noël était avant tout la fête de la Paix, de la réconciliation. Jésus n'a-t-il pas dit en venant au monde, comme le dévoile la chanson, "Humains aimez-vous"?

Rôle social de l'Eglise sur notre terre varoise

Nous l'avons évoqué dans la rubrique des blasons: les abbés de Saint Victor à Marseille étaient seigneurs temporels et spirituels des terres de Six-Fours. A ce titre ils avaient beaucoup d'ascendant sur la population: ils reçurent de seigneurs partant en croisade, des legs de domaines, terres sur lesquelles ils multiplièrent les constructions de lieux saints. La chapelle de la Pépiole en est un exemple. (Voir illustration du Monastère de la Pépiole)

L'Eglise était présente dans tous les événements de la vie comme pour tous les Français. Ainsi elle est présente au cœur de l'événement, lors de l'érection en commune du quartier de la Sagno. En effet si la Seyne est devenue indépendante en se séparant de Six-Fours, c'est grâce à l'abbé de Franchipani, abbé de Saint Victor qui était seigneur des terres de La Sagno et qui intervint avec fermeté auprès de Mazarin pour faire avancer le dossier de demande de séparation des deux communes. Le jeune roi Louis XIV prit soin d'étudier ce dossier et décida de l'indépendance du quartier de La Sagno par lettre patente où il précisa avec force détails les limites de la nouvelle ville. Mais si cette lettre parvint au tribunal d'Aix en Provence en juillet 1657, l'acte officiel d'érection en commune de ce quartier ne prit effet qu'au mois de Mars de l'année suivante, en 1658. Les autorités municipales choisirent le Dimanche de Pâques pour célébrer cet événement: le lieu de proclamation et de signatures fut la chapelle des Pénitents gris, située à cette époque sur la place Séverine.

Le rôle social de l'église s'étend aussi dans le domaine médical: un Hôtel-dieu est construit dans la rue que l'on nommera un temps "rue de l'Hôpital" et qui devint tour à tour tribunal de justice, école communale, siège de diverses sociétés seynoises et actuellement "école des Beaux-Arts" dans la rue Messine. Les religieuses et les prêtres s'y sont dévoués pour les malades et plus particulièrement lors des épidémies de choléra ou de peste. L'hôpital maritime de Saint Mandrier fut bâti sur les terres voisines du Prieuré de Saint-Mandrier où les marins malades se rendaient, sûrs d'y "trouver des mains charitables pour les soigner, ainsi qu'un réconfort moral et chrétien pour les assister dans leurs derniers moments." (G. Argensse ) Un lazaret fut donc construit et accueillit de nombreux malades, particulièrement des pestiférés. Colbert et Louis XIV décidèrent la construction sur des terres voisines, de l'hôpital maritime qui porterait jusqu'à la mort de Louis XIV le nom "d'hôpital Saint Louis", dirigé par le Prieur de Saint Mandrier. "Plusieurs marins y décédèrent et furent munis des Sacrements de l'Eglise par le Prieur qui les accompagna jusqu'au cimetière de l'hôpital." ( G. Argensse)

La scolarisation des enfants et adolescents fut également une préoccupation majeure de l'Eglise. Les jeunes filles étaient accueillies au couvent de Notre-Dame de la Présentation dirigé par des religieuses. Les jeunes garçons étaient scolarisés chez les Pères Maristes à l'Institution Sainte-Marie ou à l'externat Saint Joseph, au Boulevard du 4 Septembre. Les sœurs de Saint Vincent de Paul quant à elles, se souciaient de l'éducation des orphelines à l'orphelinat N-D de la Présentation, rue J. Laurent et animaient des patronages.

La place Bourradet, que nous connaissons sous le nom de place Martel Esprit fut le témoin des œuvres de l'église. Un obélisque y avait été élevé en reconnaissance au dévouement de toutes les personnes qui avaient soigné avec abnégation les victimes de l'épidémie de choléra. Parmi ces personnes à l'honneur, les Sœurs Trinitaires de l'Hôtel-Dieu. Cet obélisque fut ensuite transporté au cimetière où il se trouve toujours. Les Pères Capucins qui occupaient la propriété actuelle des Pères Maristes avaient reçu du Sieur Tortel une source sise sur ses terres et voisine de celle de ces Pères Capucins. Ils utilisèrent cette eau pour leurs besoins propres puis constatant le manque de point d'eau dans la commune, ils firent construire une canalisation allant de leur propriété jusqu'à la place Bourradet où l'eau put jaillir dans une fontaine que les Pères firent édifier et qui fut baptisée "Fontaine de Saint François", en mémoire de Saint François d'Assise.

Enfin rappelons qu'en Provence toute fête ne peut se concevoir sans une messe, que nos Provençales et nos Arlésiennes arborent fièrement à leur cou une croix soutenue par un ruban de velours noir.

Provence, terre de marins qui, à vivre entre ciel et mer se veulent proches de Dieu et de Marie, "Notre-Dame de la mer", Provence, ouverte sur le monde grâce à tes côtes, Tu es une terre d'accueil chaleureuse et en cela tu te fais disciple de Jésus! Toi qui pour sainte patronne, a choisi Sainte Marie-Magdeleine que tu accueillis un jour avec ses amis sur la côte camarguaise et dont la sépulture est sans doute le premier monument chrétien de ta terre , tu enfantas des monastères, des abbayes aux noms glorieux: St Victor, Montmajour, Lérins, où furent formés tant d'évêques et même des papes, Silvacane, Sénanque, Le Thoronet, La Celle, Montrieux, la Chartreuse de la Verne, le couvent des Dominicains à la Sainte Baume, les Camaldules (tenus par les sœurs de Sainte Rita), celui des Montfortains et des sœurs de la Présentation à La Seyne…

Nous laisserons le mot de conclusion à Monseigneur Panafieu, archevêque de Marseille: "notre église de Provence est comme un olivier. Elle a une longue tradition et pourtant elle reste jeune et vivante."

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